Ouverture : Danse

publié le 22/03/2016
mis à jour le 01/04/2016

Voûté, Papa voûté

Danse - Théâtre
Vader (Père)
Le 22 mars 2016
A la Rampe

« Salut papa. Encore ta chanson préférée, « Feelings ». Qu'as-tu mangé aujourd'hui ? De la soupe de tomates ! Je ne poserai plus jamais la question ! On va faire une balade dans le parc. On a qu'une demi-heure. » Bien peu engageant le quotidien de la maison de retraite de papa que la vieillesse a retranché derrière ses dernières capacités. La fin de vie est un sujet angoissant et difficile à traiter, néanmoins les Peeping Tom en font un sujet gonflé d'humour et de poésie.

La compagnie, fondée en 2000 par les deux metteurs en scènes Frank Chartier et Gabriela Carizzo, s'efforce de raccrocher la danse contemporaine à un ensemble théâtrale, textuel, sonore et une scénographie. Si le terreau familial est une de leurs sources d'inspirations favorites, les créations restructurent la réalité et forment à chaque fois des univers fantasmagoriques et oniriques pour mieux parler de nos émotions. Vader, présenté ce triste jour du mardi 22 mars, est le premier volet d'une trilogie suivi de Moeder (Mère) et Kinderen (Enfants).

Il est difficile de poser des mots sur l'histoire que l'on nous raconte, c'est un ensemble de tableaux comme une série d'images qui évoquent la déliquescence d'un homme entre la vie et la mort, soit à la maison de retraite. Les relations avec son fils et celles ce-dernier avec son fils lui-même peignent les souvenirs chimériques et les projections personnels d'un homme que la sénilité amenuise. Il en est de même pour son rapport à la réalité, aux autres ou ceux avec ses douleurs, ses sensations et sa propre décadence.

Les chorégraphies exploitent d'une façon intéressante cette déperdition du corps. Les mouvements sont contorsions, rabougrissements, comme cette chanteuse dont la voix et le corps s'éteint, jusqu'à l'atrophie musculaire, l'infirmité ou l'oubli. Parallèlement, la richesse de la mise en scène est de donner une part importante à la théâtralité, au texte et au son. Le décor de cette maison de retraite, aussi angoissante que fantastique exalte les images surréalistes de la pièce. Voilà qui permet d'apprécier la danse même si le langage du corps nous parle peu. Le jeu des langues est d'ailleurs une recherche notable dans ce spectacle, puisque un plurilinguisme riche étaie l'universalité au sujet. L'anglais, le coréen, le portugais s'ajoute aux mots du décor et du corps pour ajouter du sens à cette représentation de la vieillesse.

Finalement la narration n'est pas une nécessité dans ce mouroir où le temps quasiment cyclique et ritualisé se dilue à l'infini. De ses petits vieux ne reste qu'une vie de papiers froissées, comme ces boulettes que l'on balaie du début jusqu'à la fin du spectacle, dans cette clinique en nettoyage perpétuel, une usine de retraitement de la vieillesse.


T. COPIN


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